ELLE
Une belle surprise !
Sauver la planète pour faire la fête !
Vous connaissez le Théâtre Aleph à Ivry sur Seine ? Non ? Moi non plus. Enfin c'était ma réponse il y a encore deux jours. J'en avais entendu parler mais je n'avais jamais fais le pas d'enjamber le périph. Et puis il y a eu cet anniversaire. Une amie m'invite à une soirée atypique pour ses 40 ans : Apéro – Spectacle – Dîner avec les comédiens et fête. Je me méfie : pourquoi nous infliger un spectacle alors qu'on se retrouve avec toute la bande de copains ! C'est à cette occasion que j'ai atteint la rue Christophe Colomb où l'indien Oscar Castro sévit.
Tout de suite je suis saisie. Rien à voir avec les salles morbides louées à prix d'or où seul le plaisir de se retrouver ensemble sauve la soirée. A l'Espace Aleph on est accueilli à bras ouverts et on ne vous reproche même pas de n'être jamais venu avant. Les rencontres se font quand elles doivent se faire ….
Le Théâtre Aleph hante les lieux depuis 12 ans. Tout à coup une angoisse m'envahit. J'ai vécu 12 ans sans connaître ce monde ! En somme je n'ai fait que survivre …
Ce soir là, le Théâtre Aleph m'a offert la pièce « Hasta la vida siempre ». Je me rendais à l'anniversaire d'une amie et c'est elle qui m'a fait un cadeau. Le comble, non !
On commence par boire un coup. Les comédiens sont là, au bar avec nous. On ne sait pas qui sera sur la scène dans quelques minutes. Puis, le temps de monter les escaliers, les comédiens finissent leurs verres cul-sec, nettoient le bar et montent sur scène où ils enfilent l'habit de lumières comme si de rien n'était. On entre immédiatement dans le monde qu'ils nous proposent. On est avec eux sur scène. On a envie d'entrer dans la conversation.
Dans cette comédie écologique, Oscar Castro raconte une histoire d'amour et d'amitiés. En effet pourquoi sauver la planète si ce n'est pour faire la fête assène-t-il à la fin du spectacle.
Spectacle dans lequel l'amitié tient un rôle particulièrement touchant et essentiel.
L'amitié entre Alfredo et Bernardo : deux personnages qui n'ont, à première vue, rien de commun. L'un (Ulysse - Alfredo) s'engueule avec les arbres qui le méprisent et passe ses journées et ses nuits en robe de chambre et chaussons à copier les poèmes de Neruda sur son clavier pour séduire sa Pénélope ; l'autre (Bernardo) hante les cocktails de la communauté française de cette petite ville du sud du Chili pour comparer les petits fours et se fait fort d'être présent à tous les sabrages de champagne que la région peut compter. Malgré cela, toutes leurs rencontres, aussi cocasses soient-elles, nous révèlent le lien magique et mystérieux de l'amitié.
Ce lien délicat, Oscar Castro le dévoile aussi, tout au long de la pièce, avec un raffinement juste et précis dans la relation existant entre Natacha et Violeta (alias Pénélope).
En apparence elles ont plus de points communs : Toutes deux françaises expatriées au Chili, elles courent le pays ensemble pour faire leurs recherches sur les glaciers de la Patagonie et donner leurs conférences sur le réchauffement de la planète. Mais elles ne ressentent pas la vie de la même manière et n'ont pas la même analyse des faits.
Elles réagissent aux évènements par des comportements distincts : Violeta est vexée d'apprendre que son amour plagie le poète pour la séduire alors que Natacha trouve ça touchant, elle l'envie même un peu ; Elles débattent vivement de la question de savoir si ce monde dépravé mérite ou non qu'on lui donne un enfant. Mais l'amitié qui les lie leur permet de profiter de leurs désaccords pour s'enrichir mutuellement et se réjouir du bonheur d'apprendre à se connaître.
En somme cette pièce, outre le message écologique qui est envoyé de manière très drôle et sans lourdeur didactique, fait sentir que l'amitié se nourrit mystérieusement de la différence.
Merci à Corinne pour ce merveilleux cadeau d'anniversaire et d'amitié.
Adelaïde Kencid